Les coachs s’adressent – à priori – à des personnes en bonne santé. C’était le cas tout au moins dans le démarrage du coaching et sur le papier. Le coaching ne s’inscrit pas du tout dans une démarche thérapeutique, au contraire des psys, mais dans une démarche de développement. Le coach a des clients, pas des patients.
Suite de l’article « Coachs & psy après un burnout ou un cancer »
Une formation à la psychopathologie
Il est certain que la frontière est faible parfois, et c’est là que le bât blesse. A partir de quand une démarche thérapeutique commence et se différencie d’une démarche d’accompagnement ? Plus généralement, se pose la question de savoir quand une personne a besoin d’un soin plutôt que d’un accompagnement. Comment faire le tri entre des freins personnels et des maladies psychiques : que ce soient des troubles du comportement ou autres. Que dire des personnalités complexes et toxiques, comme les pervers narcissiques, que les coachs ne sont pas toujours en mesure de détecter ?
S’il est un domaine de formation des coachs qui doit mériter un effort singulier, c’est bien sur la psychopathologie : savoir mieux reconnaitre et identifier les personnes avec des troubles psychiques. Si l’humilité du coach est son meilleur allié pour lui conseiller d’envoyer un client vers un professionnel de santé, c’est un aspect de sa formation qui est très largement sous-estimée. Peut-être aussi car il est difficile de trouver des psychiatres qui acceptent de former des coachs sur ces fondamentaux. C’est bien de médecine dont nous parlons alors. A mon sens, mais c’est une recommandation qui n’engage que moi, il serait très utile de former de la même manière les psychologues et les coachs sur ce volet psychopathologie.
Pour autant, les maladies iatrogènes n’ont pas été inventées par les coachs. Je vois souvent des psychologues faire grand cas de supposés coachs ayant eu un impact négatif sur le client, et c’est voir une réalité mais un peu oublier ses propres faiblesses. De même, faut-il mieux un psychologue fraichement émoulue de l’école, à 25 ans, qui s’installe à son compte qu’un coach de 50 balais qui a vu passer du monde ?
Un objectif précis
Seconde différence : les coachs sont concentrés sur des objectifs de développement personnel précis et dans une démarche brève. Il ne s’agit pas rentrer dans une analyse du « moi profond ». C’est bien clair dans le mandat d’un coaching et la première question est : quel est l’objectif ? Pourquoi êtes-vous là ? Ce n’est pas parfait bien entendu, car l’objectif premier n’est pas toujours le véritable. Il peut aussi avoir été induit par un donneur d’ordre comme un Rh ou un manager, mais au moins le cadre est posé. C’est une sécurité pour le coach de voir que si le travail avec son client dépasse largement les objectifs fixés par le contrat relationnel, il doit soit le signifier à son client et s’arrêter, soit l’orienter vers un professionnel de santé.
Le psychologue lui aussi travaille avec un objectif bien entendu, mais dans l’imagerie générale, c’est avant tout s’allonger sur un divan et parler pendant des heures. C’est n’est plus la réalité des psychologues, et le nombreuses approches, comme les TCC de troisième génération, ont véritablement chamboulé la pratique semble t-il. Mais pour un client, rentrer chez un psy, c’est encore un peu comme l’asile d’aliénés et « Vol au-dessus d’un nid de coucou » : on sait quand on y rentre, pas quand on en sort.
Avec un coach, au moins, on sait que l’on va travailler un certain nombre d’heures et de séances, et basta. C’est, à mon sens, un vrai changement de perception.
Une connaissance de l’entreprise
Enfin, dernière différence et non de moindres : Les coachs connaissent l’entreprise. Ce sont des personnes qui viennent des sociétés, avec des parcours très variés et très riches souvent. Ils sont ou étaient RH, experts, ingénieurs, commerciaux, responsables de communication. Ils connaissent parfaitement le type d’entreprises dans lesquelles ils travaillent. Ils en maitrisent les codes, la culture, les façons de décider, les montants des prestations. Bref, ils parlent avec facilité avec le donneur d’ordre en face.
A l’inverse, les psychologues sont, pour la plupart, en activité dans le secteur social ou santé, ou en cabinet. Beaucoup ne connaissent pas l’entreprise, ou alors de très loin et en ont souvent une idée aussi diabolique que l’entreprise en a des psychologues ! Ils ne savent pas comment ça marche. C’est un handicap certain pour rentrer dans ces organisations et trouver les mots qui vont bien pour vendre une prestation. C’est là aussi une grande différence, un coach vend un accompagnement, un psychologue est dans une démarche de médecine, de soin, où il est contre la déontologie de vendre.
Surtout le psychologue n’a pas la plus petite idée de la façon dont marche une entreprise, et en particulier un grand groupe. Sans même parler de l’aspect bilingue ou multiculturel de certains.
Cela rend complexe pour eux d’entrer dans ces environnements. Mais cela rend surtout complexe la compréhension de la problématique du client. Si l’idée est de travailler sur un objectif, il faut quand même comprendre très vite le contexte, le jeu des acteurs possible, ce qui est possible d’envisager comme option de travail, où est la ligne rouge entre ce qui se fait ou pas pour le client. Cette ignorance se ressent dans l’accompagnement. Certaines personnes reviennent d’un rendez-vous avec un psychologue en disant « il est très bien mais il a du mal à comprendre ». La personne en difficulté dans son poste ou qui veut améliorer sa performance, ne veut pas donner un cours de management à son psychologue.
Mais concrètement ? A quoi sert ce constat s’il ne permet pas d’améliorer le sort des personnes au sein de l’entreprise ?
L’idéal : une double formation coach et psychologue
Lorsqu’il s’agit de coacher des personnes sur des objectifs de performance, ou de faire un coaching d’équipe très orientée sur du team building, il est évident que le coach peut suffire à cette mission. Une formation de thérapeute n’est pas nécessaire, en dehors de vérifier certains aspects de psychopathologie.
La question est plus délicate quand le coach commence à travailler avec des personnes en plus grande difficulté psychologique, comme par exemple avec des profils très borderline, ou pervers comme il en existe aussi parmi les managers. Mais surtout, quand la personne est en difficulté dans son poste, soit avant un burnout ou lors du retour dans un arrêt longue durée lié à un burnout mais aussi à un cancer.
J’avoue que j’aurais aimé avoir une formation de psychologue pour être plus confortable dans les accompagnements que je fais. En plus de ma formation de coach, car je pense les deux vraiment complémentaires et utiles. Avoir un titre de psychologue ou de psychothérapeute et un diplôme de coach certifié, c’est disposer d’un regard très large, de nombreuses options. C’est aussi pourquoi j’ai entamé une formation de logothérapeute : pour avoir une vision plus ouverte du métier. Je rêve aussi de faire une formation de psychothérapeute un jour, mais il est difficile d’être partout, de se former et de gagner sa vie. Plus précisément la masse d’information à ingérer est déjà importante en Logothérapie. A chaque jour suffit sa peine.
Pour autant, la plupart de nos clients sont aussi accompagnés par une psychologue ou psychothérapeute en dehors du coaching de retour en activité. Les deux ne semblent en rien contradictoires mais bien complémentaires si j’en crois leur retour. Il ne convient donc pas choisir entre le coach ou le psychothérapeute lors du retour en entreprise, mais bien de travailler avec les deux. Sous réserve que le coach soit formé le plus près possible d’une formation de psychothérapeute et supervisé.
La supervision est indispensable pour l’accompagnement des personnes après arrêt, car si vous y réfléchissez bien, vous allez voir tout le temps et tous les jours des personnes en souffrance, en difficulté. Ceci n’est pas le cas de la grande majorité des coachs. Il est donc indispensable d’avoir une hygiène psychique irréprochable. J’irai même plus loin; idéalement en étant supervisé par un psychologue ou un psychothérapeute, avec un groupe de supervision le plus psy possible. Les groupes de supervision de coachs peuvent être de qualité variés selon les profils des coachs et leurs pratiques, il est important de viser haut.
En conclusion, nous recommandons chez et-maintenant à la plupart de mes clients d’avoir un accompagnement thérapeutique en parallèle. il n’y a pas d’opposition dans notre esprit entre les deux, mais une vraie complémentarité au bénéfice des personnes de retour en entreprise.